Pour Une Martinique Autrement

La Martinique et la Guadeloupe victimes de la dérive scientifique ?

La Martinique et la Guadeloupe victimes de la dérive scientifique ?

 

Est-ce un hasard ? Le Parisien, quotidien national sort un article à scandale, en plein salon de l'agriculture, sur les pesticides aux Antilles. Cet article prend appui sur une étude menée par un cancérologue dans le cadre d'une soit disant association de scientifiques basée à Bruxelles.

Commande de cette étude, datant du 30 octobre 2013, lui aurait été faite par un docteur, praticien à la retraite de la fonction publique et fondatrice d'une association dans ce domaine. C'est un travail certainement rémunéré, comme l'a été l'intervention de ce spécialiste, faite en 2006 et 2007 pour le compte de notre association PUMA. Nous connaissons bien et depuis longtemps ce médecin.

Par ailleurs en 2006, nous, PUMA désespérions d'être entendus sur la question du chlordécone que nous considérions être une contamination des sols particulièrement préoccupante pour la santé des guadeloupéens et des martiniquais. Sauf que, contrairement à d'autres, il ne s'agissait pas de faire de procès d'intention, de fabriquer des boucs émissaires, mais simplement de faire sérieusement prendre en compte une réalité reconnue du bout des lèvres par les services locaux de l'État.

Constatant alors que ce sujet n'était pas la préoccupation première des rédactions locales, nous avions consulté les différentes sections scientifiques qu'offre le réseau national et établi un ''casting''. Notre mission était de recruter un bon "artificier " pour faire exploser cette bombe médiatique. Dans cette optique, le meilleur profil fut retenu : le cancérologue que tout le monde connait.

Et c'est ainsi que, début 2007, grâce à un député martiniquais fraîchement élu, nous avons pu organiser à l'Assemblée Nationale une conférence de presse pour dénoncer ce très grave danger sanitaire.

De ce fait, le média pour allumer la mèche a été le Parisien. En quelques jours, le scandale du chlordécone était devenu un sujet national.

Les dégâts collatéraux furent importants. Nous en sommes conscients. Mais une clairvoyance était indispensable tant au sommet de l'État que chez nos agriculteurs.
Aujourd'hui un troisième plan chlordécone est en préparation, après que plus de 69 millions d'euros aient été investis dans les deux premiers.

L'objectif est totalement atteint et le travail de PUMA aura été essentiel.

Mais pendant cette période de collaboration, ce cancérologue et nous, avons eu le loisir d'évaluer nos forces et nos faiblesses respectives. De la sorte, il fut auditionné officiellement par la Commission des Affaires Économiques de l'Assemblée Nationale. Ce spécialiste a du concéder des "inexactitudes" dans son rapport sur le chlordécone aux Antilles pendant que sa rigueur scientifique a été publiquement mise en cause.

Nous avons ainsi découvert sa propension à valider des données sans les vérifier au préalable.
Aussi, alertés par ce comportement, différents services de l'État se sont mis à nous fermer leur porte au seul énoncé de son nom. Nous avons du prendre nos distances, car nul n'a le droit d'attenter à l'espoir des gens, ni de trahir leur confiance.

Nous avons appris à faire la différence entre un homme médiatiquement audible et un homme scientifiquement crédible.

En martiniquais et guadeloupéen responsables de notre pays sur le plan de la santé, de l'environnement, et de l'économie, nous avions réalisé que, chez ce cancérologue, il y avait un fort penchant à être un marchand de la peur. On trouve des moyens pour guérir de la folie, mais en trouve-t-on pour redresser un esprit tordu ?

Et, plutôt que de l'aider à faire prospérer ce fond de commerce, nous avons préféré nous rapprocher du monde de l'agriculture, choqué par l'ampleur de la médiatisation que prenait cette affaire. Ce, pour mieux les écouter, les comprendre et mieux connaître leurs difficultés afin de les encourager à faire évoluer leurs méthodes de culture.

Notre but était atteint : mettre la question de la pollution au chlordécone au premier rang des préoccupations gouvernementales.

Depuis 2008, plus de 69 millions d'euros ont financé différents actions et travaux de recherches essentiels. Aussi, notre finalité étant d'œuvrer pour une agriculture durable des Antilles françaises, de ce point de vue, PUMA s'est reconnu dans le Plan Banane Durable lancé par la filière, le gouvernement et les exécutifs régionaux de Guadeloupe et de Martinique.

Dès lors, nous n'avons cessé de trouver dans la banane une filière pleinement engagée dans un effort de maîtrise totale de son environnement. C'est une vérité qui dérange peut-être, mais nous n'y pouvons rien. Nous nous sommes penchés sur les difficultés rencontrées en lien avec des maladies nouvelles sous le climat tropical humide. Et nous nous sommes publiquement engagés à leurs côté. C'est une attitude qui en trouble plus d'un, mais nos producteurs le méritent.

Pourtant, nous sommes les premiers à avoir lancé l'alerte sur le chlordécone. Et nous étions les seuls. D'ailleurs, aucun de ceux qui, depuis trois ans, font feu de tout bois autour du traitement aérien n'était présent à ce moment. Pour autant, nous ne serons pas de ceux qui feront un amalgame systématique entre chlordécone, traitement aérien, Banole, fongicides, etc.

Ce procédé est économiquement irresponsable et intellectuellement malhonnête.
Notre conviction est que les producteurs de bananes travaillent actuellement dans le respect des règles européennes les plus sévères et que les produits phytopharmaceutiques utilisés répondent à ces normes. Les exigences d'aujourd'hui, en matière de santé publique et d'environnement, n'ont rien à voir avec celles des années 70 et 80 -période d'utilisation du chlordécone-.

A ce jour, se sont écoulées plus de trente années de renforcement continu des méthodes d'évaluation, des règles de traçabilité alimentaire et des exigences phytosanitaires.
Néanmoins, c'est sans surprise que nous voyons revenir ce marchand de la peur : "Perturbateur endocrinien", "cancérigène" ... Les mots les plus effrayants sont lâchés. Mais personne aux Départements Français d'Amérique ne le connait mieux que nous.

En février 2013, la Présidente de l'association en santé publique lui a passée une commande sur Banole afin de tenter de nous discréditer. Autre commande en octobre 2013 : l'expertise de cinq produits figurant dans la liste autorisée par l'État. Laquelle ne contient que trois produits utilisés par les producteurs de bananes : deux fongicides et l'huile de paraffine de Banole. Serait-il rémunéré pour cela ? Dans ces conditions, ses conclusions ne nous surprendraient pas.

La crédibilité de cette expertise établie par d'autres de nos scientifiques est mise en doute : pour preuve son revirement prévisible sur Banole qu'il reconnait non cancérigène finalement. Bien que nous soyons les mieux placés pour savoir que cet homme-là n'est pas scientifiquement crédible, il revient à la Présidente commanditaire de cette évaluation,  de venir devant la population reconnaitre quelle s'est trompée  en récupérant l'homme et ses résultats. A moins de pousser la manipulation jusqu'au comble de vivre avec beaucoup de mauvaises actions sur la conscience et quelques bonnes intentions dans le cœur.

Chacun d'entre nous, fait partie de ce fond de commerce visé par ceux qui ont pris le parti d'être des marchands de la peur.

Guadeloupéens et martiniquais, prenons garde de ne pas instaurer nos régions en victimes de la dérive scientifique.

 

     Pour l'association écologique PUMA

    Le Président

    Florent GRABIN

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